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Impressions : Les Teintures de France entrent en matières

Spécialiste du traitement textile depuis 2009, l’atelier parisien occupe une place de choix dans le microcosme des prestataires du luxe grâce à la variété de ses prestations haut de gamme, catalysées par un équipement technologique dernier cri. Givenchy, Jean-Paul Gaultier, Courrèges, etc. : les grandes maisons font aujourd’hui appel à son expertise pour imaginer la mode de demain. 

On se croirait dans les coulisses d’un défilé de mode. Impeccablement rangées sur des portants, des centaines de vêtements arborant des étiquettes aux noms évocateurs du luxe garnissent l’atelier des Teintures de France, située à Bonneuil-sur-Marne (94). Dans l’espace lumineux de 1500 m2, une trentaine d’employés s’affairent, concentrés sur leurs machines. À chacun sa spécialité : teinture, délavage, découpe laser. Au fond du bâtiment, une nouvelle section dédiée à l’impression numérique textile vient d’ouvrir, à la demande de grandes Maisons de couture. « De plus en plus de nos clients se lamentaient de devoir partir en Italie pour réaliser leurs impressions. Les créateurs perdaient un temps précieux pour concevoir leurs collections », explique Serge Haouzi, le directeur artistique des Teintures de France, maître-teinturier depuis plus de 30 ans. Les Teintures de France ont investi dans une Monna Lisa 8000 de chez Epson. Omniprésente dans la région de Côme, épicentre de la production textile du nord de l’Italie, cette solution d’impression s’est imposée comme une évidence pour l’atelier francilien. Un responsable technique spécialisé a été recruté pour la faire tourner.

ÉQUIPEMENT DE POINTE

Pour Les Teintures de France, l’objectif est d’apporter un service local de création aux grandes maisons basées à Paris. « Un styliste peut venir le matin avec ses fichiers et repartir le soir avec ses prototypes imprimés », indique Serge Haouzi. Pour autant, Les Teintures de France ne cherchent pas à concurrencer les productions italiennes. L’entreprise ne se positionne pas sur les mêmes volumes et les tarifs pratiqués par l’atelier français sont supérieurs. Mais la réactivité offerte séduit : Loewe, propriété du groupe LVMH, Jean-Paul Gaultier ou encore Courrèges comptent parmi les premiers clients d’une activité d’impression destinée à monter en puissance.

Pour assurer leur développement et rester dans la course, les dirigeants des Teintures de France investissent exclusivement dans des solutions technologiques parmi les plus pointues du marché. La Monna Lisa en est un bon exemple. Fin 2022, l’entreprise est également devenue le premier atelier français à acquérir une J850 Techstyle de chez Stratasys, une solution qui permet d’imprimer directement en 3D sur différents textiles.

Un premier projet d’envergure a été dévoilé en janvier à l’occasion de la présentation du concept car Inception de Peugeot, sur le salon CES de Las Vegas. Stratasys, déjà mis à contribution pour les tapis de sol du véhicule, a soufflé le nom des Teintures de France au constructeur pour réaliser un vêtement en lien avec l’univers du prototype. L’atelier a collaboré avec le designer français Emeric Tchatchoua, fondateur de la marque 3.PARADIS, pour concevoir le projet.

Le recours à l’impression 3D a permis de satisfaire l’ambition du styliste qui désirait recréer le phénomène lumineux des aurores boréales sur un vêtement, une veste en l’occurrence. Un défi de taille pour l’atelier de Serge Haouzi qui devait réussir à reproduire les changements de couleur du phénomène naturel sur une pièce de tissu. « Selon l’angle de vue, le vêtement ne devait pas avoir la même couleur ». Ce fut une première très réussie et un bon buzz pour l’atelier qui, depuis que le projet a été rendu public, reçoit des sollicitations du monde entier.

LABORATOIRE DE CRÉATION

Si l’entreprise commence à s’ouvrir à de nouveaux secteurs, tel que l’automobile, son cœur de métier demeure le luxe et la haute-couture : deux secteurs en quête perpétuelle d’innovation pour lesquels elle fait office de laboratoire. Opérant dans l’ombre, les équipes de Serge Haouzi relèvent tous les défis soumis par les stylistes, en faisant appel à l’impression ou d’autres techniques. À la manière de chimistes, le pôle Création n’a de cesse d’expérimenter et de tester des process afin de parvenir au résultat escompté par les designers. « Même si une machine n’est, a priori, pas destinée à réaliser une procédure ou s’adapter à un tissu, nous testons tout de même l’idée. Les demandes concernent des pièces uniques ou 20 mètres de tissu, donc la liberté d’action est totale », affirme le directeur artistique.

La variété des équipements présents dans l’atelier constitue un cas rare dans l’industrie textile française. Notre pays compte des teinturiers d’exception, des spécialistes du délavage ou des imprimeurs experts, mais la polyvalence des Teintures de France fait exception. L’atelier fonctionne ainsi à la manière d’un one-stop shop, au sein duquel la haute-couture et le prêt-à-porter de luxe piochent pour satisfaire l’intégralité de leurs besoins, et ce, à proximité immédiate de leur lieu de création.

En dépit de sollicitations croissantes, Les Teintures de France ne se fixent pas pour ambition d’atteindre un niveau de production industriel. « Produire 50 000 pièces, ce n’est pas notre vocation. On souhaite rester une PME pour apporter un service premium et personnalisé à nos clients », martèle Serge Haouzi. Le périmètre d’action de l’entreprise est donc appelé à rester raisonnable, contrairement à la soif de création qui perdure. D’ici la fin de l’été, un pôle broderie viendra ainsi compléter le panel de compétences de l’atelier.

(c) Les Teintures de France

Source du visuel principal : Rabih Kayrouz.

Détenteur d’un MBA en Management stratégique (Université Laval, Canada) et d’une Maîtrise de gestion (Paris IX Dauphine), Bertrand Genevi possède dix ans d’expérience dans les médias (L’Express, 20 Minutes) et en agence de communication (Hopscotch).