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    Créanog : logique de la sensation

    Le sens du détail, Créanog s’y attache au quotidien, depuis son atelier de gaufrage et de marquage à chaud du Viaduc des Arts, dans le douzième arrondissement de Paris. À sa tête, Laurent Nogues, diplômé de l’École Nationale Supérieure des Arts Appliqués et nommé Maître d’Art par le Ministère de la Culture en 2011. Un homme qui manie aussi bien la création graphique que le savoir-faire d’un artisan, le tout baigné dans un goût certain pour les nouveaux outils numériques.

    Laurent Nogues lance Créanog en 1994, dans le sillage de son père, imprimeur spécialisé dans le packaging de luxe. L’idée est « d’accompagner les marques et les agences de communication dans la matérialisation en relief. »Le jeune artisan constate qu’à l’époque il n’existe sur le marché qu’une connaissance très relative des savoir-faire du marquage à chaud et du gaufrage. Rapidement, le dirigeant décide de lancer un studio de création et l’intègre dans sa structure, « pour susciter l’envie de solliciter ces techniques, mais aussi en projeter une autre utilisation. »

    TECHNIQUES SOUS-EXPLOITÉES

    De l’avis de Laurent Nogues, le marquage à chaud et le gaufrage étaient alors sous-exploités par les annonceurs. « Ces techniques étaient cantonnées à des utilisations basiques, incluant le nom du produit et de la marque, rarement plus. Représenter un visuel élaboré était rarissime ».Une ambition intime l’animait alors, et ne l’a pas quitté depuis : valoriser l’impression en relief, apparue dès le XVIe siècle, et la mettre au service d’idées contemporaines. Pour en faire une technique ancrée dans le présent, mais néanmoins dotée d’un grain singulier.

    IDENTIFICATION DE MARQUE

    Chez Créanog, ce particularisme s’exprime historiquement dans des dossiers de presse et des cartons d’invitation aux détails très travaillés, réalisés pour de grandes marques. Si le monde de l’édition a souffert de l’avènement du digital, l’entreprise parisienne a tenu bon en appréhendant tous ses projets comme des produits d’exception. L’orage passé, un engouement retrouvé pour le carton d’invitation est apparu ces dernières années, pour établir un nouvel équilibre, probablement plus sain, entre le digital et le papier. « Nous vivons dans un monde de surconsommation d’images digitales. Et l’uniformisation guette : il devient difficile d’affirmer si une image émane de Dior, Chanel ou Cartier. Mais grâce à un carton d’invitation, une marque est en mesure d’exprimer ses valeurs, son histoire et bien d’autres critères d’identification qui lui sont propres », plaide Laurent Nogues.

    « Le gaufrage apporte le sens du toucher, grâce auquel une marque ou une institution communique autrement. L’expérience du lecteur s’enrichit et l’impact du dispositif s’en voit décuplé », Laurent Nogues, dirigeant de Créanog

    FAIRE APPEL AUX SENS

    Car rien ne remplace le contact tactile du papier ou du carton. « La technique de gaufrage a cela d’exceptionnel. Elle apporte le sens du toucher au-delà de la vue, et grâce à cela, une marque ou une institution communique autrement. L’expérience du lecteur s’enrichit et l’impact du dispositif s’en voit décuplé », défend l’artisan. Ces propriétés tactiles ne se limitent pas à une expérience haptique. Elles peuvent aussi revêtir un aspect fonctionnel : Créanog collabore ainsi avec les Éditions du Patrimoine pour une collection d’ouvrages destinés aux personnes déficientes visuelles. Le gaufrage donne alors une perception précise de chefs-d’œuvre architecturaux comme le Panthéon ou l’Abbaye de Cluny.

    ÉMULATION ENTRE MÉTIERS D’ART

    Si Laurent Nogues nourrit son processus créatif des échanges avec ses clients, il n’en oublie pas ses semblables. Une aventure menée entre 2017 et 2019 avec Wonder Lab, un collectif d’artisans d’art français, lui a permis d’exposer à Tokyo. Une étape charnière dans le développement de Créanog. Depuis, les uns travaillent avec les autres, dans une approche transverse entre métiers d’art. Une complémentarité et une émulation qui ouvrent la voie vers d’autres champs d’applications pour l’atelier, comme l’association du papier et du verre, ou le rapprochement du gaufrage et de la broderie. « Nous construisons pas à pas une offre à la fois originale et globale. C’est un atout dans un secteur du luxe en attente d’une démarche exclusive et d’un interlocuteur unique, de la conception à la production », explique le dirigeant.

    « Maîtriser un savoir-faire historique est une chance exceptionnelle, mais rien n’empêche de le faire évoluer avec des solutions modernes », Laurent Nogues, dirigeant de Créanog

    ACCOMPAGNER LE PASSAGE DU TEMPS

    Mais les créations pointues de Créanog prennent aussi vie grâce aux derniers outils numériques, auxquels Laurent Nogues n’hésite pas à accorder une place de choix. « Maîtriser un savoir-faire historique est une chance exceptionnelle, mais rien n’empêche de le faire évoluer avec des solutions modernes. » Intégrer la programmation 3D et la commande numérique ont ainsi permis à Créanog d’opérer un bond dans la matérialisation et la recherche de nouvelles écritures. Gravure de formes à la géométrie parfaite, effets de dégradé en dorure : le terrain de création s’est élargi à des productions impossibles à la main, sans toutefois la remplacer.

    En ardent défenseur de l’artisanat français, Laurent Nogues insiste sur le savant équilibre à trouver entre deux mondes que l’on pourrait croire antagonistes : « Si nous nous mettons au service de l’idée contemporaine et si nous intégrons le progrès, des entreprises telles que la nôtre seront toujours en mesure, demain, de perpétuer la tradition de l’impression en relief. »

    Source des visuels : Créanog

    Détenteur d’un MBA en Management stratégique (Université Laval, Canada) et d’une Maîtrise de gestion (Paris IX Dauphine), Bertrand Genevi possède dix ans d’expérience dans les médias (L’Express, 20 Minutes) et en agence de communication (Hopscotch).