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    Photo : comment la PME Flexilivre s’empare de l’IA générative

    Active depuis une dizaine d’années dans la création et l’impression d’albums photos, la PME française, outsider sur un marché trusté par quelques gros acteurs, a récemment lancé son offre « Magic Album », permettant la création automatique de livres, grâce à une solution ad hoc d’intelligence artificielle, développée en interne.

    « Un marché très exigeant ». Voilà comment Kamel Boughaleb, directeur technique de Flexilivre, qualifie le marché de l’album photo, sur lequel son entreprise, dont les équipes sont basées entre Toulon, Bordeaux et Paris, évolue depuis plus de 10 ans. En effet, ce marché est essentiellement trusté par des acteurs de grande taille, qui jouent surtout sur le prix et les promotions à répétition. Quelques outsiders résistent, dont Flexilivre, 5 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. « On résiste parce que, depuis le début, l’innovation est centrale dans notre projet, rembobine le dirigeant. En 2013, nous étions les premiers en France à permettre de créer un album directement dans un navigateur Internet, sans télécharger de logiciel. Ensuite, au lieu d’investir dans le mobile comme beaucoup, nous avons fait le choix d’orienter nos recherches vers l’intelligence artificielle. »

    ANALYSE SÉMANTIQUE

    Flexilivre fait office de pionnier sur le sujet. Kamel Boughaleb est ingénieur informatique, et dix ans en arrière, il avait déjà intégré un algorithme de détection faciale, afin de pouvoir recadrer les photos et les recentrer, comme le ferait un photographe avec la règle des deux tiers. Mais le processus restait encore long. « Même à l’époque, un utilisateur de notre site ne pouvait pas attendre 30 secondes pour obtenir un résultat. Le transfert des données était trop long pour pouvoir les exploiter pleinement grâce à des algorithmes. » Suivent des années de test, entre statistiques avancées aux frontières de l’intelligence artificielle et deep learning.       

    Il y a deux ans, Flexilivre propose un premier algorithme complet, permettant de raconter une histoire avec des photos, en découpant des moments clés. Créer un album photo de manière automatique demande de nombreuses étapes, du tri des visuels à la détection des doublons, en passant par le regroupement ou le recadrage des photos. Et fin 2024, l’entreprise a passé un nouveau cap en ajoutant l’analyse sémantique, grâce à des algorithmes génératifs. Concrètement, la solution « Magic Album » de Flexilivre permet de réaliser, rapidement, des découpes de séquences ultra précises au sein d’un dossier de photos.

    « Nous sommes capables de détecter, par exemple, que lors de la visite d’un musée, vous êtes sorti déjeuner, puis vous êtes revenu. Auparavant, cela aurait représenté deux moments différents. Maintenant, notre IA détecte que vous êtes à nouveau sur place, donc il s’agit toujours du même moment. La sémantique nous permet d’être plus précis dans l’analyse et la description de la narration », précise M. Boughaleb. Les clients peuvent fournir des centaines de photos et en quelques minutes, leur album se construit, comme ils auraient pu le faire par eux-mêmes, mais en y passant plusieurs heures.

    PUISSANCE DE CALCUL

    Pour l’étape de l’impression des albums, Flexilivre sous-traite l’opération à un partenaire lillois historique, malgré des sollicitations régulières invitant la direction de la PME à reprendre une imprimerie. « Nous y avons longuement réfléchi avec mon associé. On a statué sur le fait que si on voulait rester innovants, il fallait mettre notre énergie dans la R&D plutôt que dans l’impression, reconnaît le directeur technique. Donc aujourd’hui, on sous-traite, mais en France, ce qui est plutôt rare dans notre marché. Il s’agit d’une imprimerie avec qui on collabore depuis notre lancement. Leurs équipes et les nôtres sont intimement liées. Il m’arrive de passer deux semaines dans leur bureau et ils peuvent aussi venir chez nous pour travailler sur des problématiques de colorimétrie. »

    Quand on lui parle de l’impact environnemental de son activité, et notamment du volet IA, Kamel Boughaleb avoue que Flexilivre n’a pas encore trouvé de solution tout à fait satisfaisante. Si le transport du papier pour impression et des albums représente 90 % du bilan carbone de l’entreprise, le recours à l’intelligence artificielle, annoncée par plusieurs études comme très gourmande en énergie, n’en reste pas moins une préoccupation.

    « L’IA demande des processeurs graphiques performants et une certaine puissance de calcul. Aujourd’hui, Flexilivre utilise une vingtaine de serveurs pour l’intelligence artificielle, le stockage des photos et faire tourner les différents process. Le sujet des data centers green est sur la table, mais dès qu’on attend une grosse puissance de calcul, ils ne suivent plus, donc cette option n’est pas viable à date. En attendant, nous avons lancé un échange avec l’université de Toulon afin d’accompagner des chercheurs sur des sujets proches de notre activité. »Des initiatives qui n’ont pas un impact direct, dès aujourd’hui, sur la production de Flexilivre, mais qui pourraient porter leurs fruits dans le futur.

    Bertrand Genevi est rédacteur en chef d'IC Le Mag. Il possède dix ans d’expérience dans les médias (L’Express, 20 Minutes, Prisma Média) et en agence de communication (Hopscotch).