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Communication lumineuse : une rentrée sous haute tension

Que faut-il attendre du décret annoncé par le ministère de la Transition énergétique fin juillet concernant la réduction de la publicité lumineuse ? Un décret daté du 30 janvier 2012 relatif à la publicité extérieure, aux enseignes et aux pré-enseignes s’applique en effet déjà en France et comprend notamment des mesures relatives à l’éclairage nocturne. Parlerait-on alors d’un simple décret d’application de la loi « Climat et Résilience » du 22 août 2021 ? D’une réécriture de la loi ? Ou de son durcissement ?
Si l’année dernière a été marquée par les débats sur la Loi Climat, cette année en voit les premières applications. À suivre aussi les révisions des Règlements Locaux de Publicité (RLP) qui, pour certains, viennent déjà sérieusement bousculer le secteur.
Bref, une rentrée sous haute tension en perspective pour le secteur de l’enseigne et de la communication extérieure. On fait le point.

Annoncé fin juillet par le ministère de la Transition énergétique, un nouveau décret destiné à rendre obligatoire l’extinction de la publicité lumineuse de 1 heure à 6 heure du matin, devrait être publié en septembre.

L’extinction des publicités lumineuses entre 1 heure et 6 heures du matin n’est pas une nouveauté en soi et on aurait pu s’attendre de ce nouveau texte qu’il étende plus largement la plage d’extinction, à la fermeture des magasins par exemple. Mais rien ne semble l’indiquer pour l’instant.

L’objectif de baisse de la consommation énergétique des commerces et locaux commerciaux est inscrit dans la loi Grenelle II depuis 2012 et prévoit déjà l’extinction des enseignes entre 1 heure et 6 heures du matin. La loi ELAN de 2018 prévoit, quand à elle, que les bâtiments affectés au commerce réduisent leur consommation énergétique d’au moins 40% d’ici à 2030 (50 % en 2040, 60 % en 2050, par rapport à 2010). Ajoutons à cela certains RLP (Règlements Locaux de Publicité) qui fixent des règles locales plus restrictives que la règle nationale.

So watt ?

Pour le ministère, ce décret a surtout pour but « de donner des pouvoirs de police administrative aux maires, pour qu’ils puissent procéder à des contraventions en cas de non-respect de la réglementation ». Par rapport au décret de 2012, « il s’agit d’aller plus loin et de punir les infractions avec une amende dite de 5e classe, qui pourra être prise par le maire après mise en demeure de l’enseigne ».
Il s’agit aussi d’harmoniser la loi : le décret s’appliquera sur l’intégralité du territoire français et de faire disparaître un certain nombre de dérogations. « Le nouveau décret va concerner tout le mobilier urbain. Il ne sera plus possible d’avoir des publicités dans la rue, éclairées entre 1 heure et 6 heures du matin. Cela concerne près de 150 000 infrastructures de mobilier urbain sur tout le territoire ». La seule exception à cette nouvelle réglementation concernera l’affichage publicitaire dans les gares et les aéroports quand les infrastructures de transports fonctionneront.

De la réduction à la sobriété

Ce décret, s’il ne change pas foncièrement la donne pour les professionnels du secteur, se veut le signe d’une volonté du gouvernement d’aller vers davantage de sobriété. Le plan de sobriété énergétique annoncé cette année s’inscrit dans un contexte particulier, marqué par l’urgence climatique, la hausse du prix de l’énergie et le risque de pénuries. C’est en ce sens d’ailleurs que le gouvernement s’est fixé pour objectif de réduire de 10% les consommations énergétiques de la France en 2 ans, par rapport à 2019.
Dans ce cadre, un groupe de travail a réuni, le 28 juillet dernier, les ministres de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, de la Transition énergétique, la ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales, les représentants des principales associations d’élus locaux et des experts en gestion d’énergie. L’idée était de mettre tout le monde autour de la table afin de trouver des solutions pour réduire la consommation d’énergie dans les collectivités territoriales. Parmi les pistes avancées : l’installation d’équipements de Gestion Technique des bâtiments (GTB) ou encore l’accompagnement des collectivités qui le souhaitent par des Conseillers en Energie Partagée (Cep), cofinancés par l’Ademe.

Dans la ligne de mire des élus

Sur le terrain, tout le monde est d’accord pour dire que la sobriété énergétique est une priorité. Mais face à la montée des préoccupations environnementales, notamment au niveau du grand public, les débats tendent à s’hystériser entre les parties prenantes, la faute en partie à une mauvaise application des lois existantes.
La loi Grenelle II, la loi ELAN, la loi Climat et son fameux article 7, etc. définissent déjà précisément le champ d’action des entreprises de l’enseigne et de la communication extérieure. Mais force est de constater que le parc n’est pas encore totalement en conformité avec la loi, l’État n’exerçant pas son pouvoir de police comme il le devrait. D’où cette accumulation peut-être de règlements et ces débats de plus en plus houleux entre élus et professionnels du secteur.
En 2016, déjà, la municipalité de Grenoble avait tranché dans le vif et fait disparaitre près de trois cents espaces publicitaires de son espace public en ne renouvelant pas son contrat avec la société Decaux. Aujourd’hui, c’est la Métropole de Lyon qui fait parler d’elle, à la faveur de la révision de son Règlement Local de Publicité (RLP). Le conseil métropolitain de Lyon a voté, le 27 juin dernier, un nouveau projet de règlement local de la publicité (RLP). Ce nouveau RLP prévoit notamment l’interdiction des écrans numériques publicitaires, la publicité sur les bâches de chantier, la publicité lumineuses en toiture, l’extinction des enseignes de minuit à 6 heures du matin, la réduction du nombre de panneaux publicitaires et de leur taille… Les cinquante-neuf communes de la Métropole de Lyon sont concernées. En complément, le Sytral mobilités, en charge de la gestion des transports dans la Métropole de Lyon, annonce qu’il va également interdire les écrans numériques dans le métro. L’entrée en vigueur du nouveau RLP est prévue pour le 1er janvier 2023 mais le délai de mise en conformité est long et, selon les dispositions, pourrait s’étendre jusqu’à 2028.  Du 19 septembre au 19 octobre, une enquête publique est prévue, avant l’adoption définitive du texte. Près de 200 entreprises et 2500 salariés sont concernés.

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Quelle issue ?

Des lois existantes qui ne sont pas appliquées comme elles le devraient, des périodes de mise en conformité nécessaires mais qui durent plusieurs années, face à une culture du résultat politique qui privilégie le court terme : autant d’ingrédients qui font qu’aujourd’hui on en arrive à des solutions extrêmes.
Comme le souligne très justement Julia Boutoille-Nojac, la présidente du syndicat E-Visions, qui fédère plus de 500 professionnels du monde de l’enseigne et de la communication visuelle, « certaines municipalités adaptent aujourd’hui leur RLP en prenant comme référent un paysage urbain qui n’est pas conforme à la loi existante. Autrement dit, elles complexifient le mille-feuilles administratif et législatif, alors qu’il serait plus constructif de faire démonter dans un premier temps tout ce qui n’a plus lieu d’être et de repartir ensuite de l’existant pour faire évoluer ou pas le RLP ». Et de rappeler que le secteur n’a pas attendu les nouvelles lois pour faire évoluer ses pratiques et qu’il a déjà pris des engagements forts en termes d’écoconception de ses enseignes et de réduction de leur consommation d’énergie.
Sont attendus pour cette rentrée non pas un mais plusieurs nouveaux décrets pour le secteur de l’enseigne, concernant le format des enseignes scellées au sol, la luminance des enseignes et la réduction de la publicité lumineuse. Plusieurs RLP sont également devenus caduques depuis le 13 juillet 2022. Conséquence immédiate, seul le code de l’Environnement s’applique désormais dans les communes concernées. De quoi nourrir de nouveaux débats.

Cécile Jarry est journaliste, rédactrice en chef d'IC Le Mag, le magazine des industries graphiques et créatives édité par Infopro Digital Trade Shows.