Depuis quelques années, le packaging crée l’événement, attise la curiosité et fait même parfois la Une des médias. Il devient un objet d’envie et de collection pour les consommateurs. Grâce à l’impression numérique, grandes et petites entreprises osent désormais l’innovation et la personnalisation. Et le packaging s’inscrit au cœur de la stratégie des marques.
Tout le monde a encore en tête la célèbre campagne de Coca-Cola dont les bouteilles de sodas arboraient les prénoms de ses clients. Figure de proue de la personnalisation de packaging, cette campagne a fait preuve de sa pertinence sur un produit puissamment universel comme le Coca-Cola. Mais elle reste difficilement transposable. « Il faut démystifier la campagne Coca-Cola, qui ne correspond pas à l’avenir du packaging », précise François Martin, Global Marketing Head chez HP Graphics Solutions Business. D’ailleurs, le mot « personnalisation » lui-même peut être trompeur. Personnalisation ne veut pas dire individualisation, mais plutôt segmentation et surtout micro-segmentation. Et c’est bien la rencontre du numérique et du packaging, associée (ou non) aux technologies traditionnelles (comme la flexographie et l’offset), qui a ouvert de nouvelles possibilités aux marques, grandes et petites.
Lien direct entre le consommateur et la marque, le packaging est un outil marketing puissant, un outil de séduction du consommateur. L’enseigne peut s’engager et prouver à ses consommateurs qu’ils partagent un même univers et des mêmes valeurs. Naturel, luxe, ludique, féminin, viril… depuis longtemps les produits transmettent des valeurs à travers leur emballage. Mais le packaging va désormais plus loin. Dorénavant, il cible, avec une grande précision, à qui il s’adresse. Utile lorsqu’on est outil de séduction !
Personnalisation ne veut pas dire individualisation, mais plutôt segmentation et surtout micro-segmentation
Une expérience utilisateur engageante
Homme, entre 18 et 30 ans, CSP+, urbain… Les marques possèdent des informations importantes sur leurs clients. Pourquoi ne pas utiliser le packaging pour s’adresser à eux ? Quoi de plus direct qu’un élément que le consommateur va prendre avec lui, emmener chez lui, intégrer dans son univers ? Pizza Hut ne s’y est pas trompé. Fini les boîtes à pizza qui encombrent la poubelles ou le salon. Le géant américain a fait appel à l’entreprise britannique Novalia – spécialiste des technologies physique et digitale, notamment sur supports imprimés – qui a transformé ces « encombrants » en table de mixage, connectées à un ordinateur ou un smartphone par Bluetooth. Les consommateurs peuvent ainsi créer leurs propres contenus et le carton à pizza, ambassadeur de la marque, ne se contente plus de traîner dans le salon, mais devient un objet de création et de convoitise. Une campagne engageante, à l’heure où les moins de 30 ans écoutent près de deux heures de musique par jour en moyenne. L’innovation technologique est le point à l’origine de la démarche de la marque nous indique de Novalia : « En s’inspirant de précédentes campagnes ayant utilisé les technologies numériques, Pizza Hut a spécifiquement développé la sienne autour des possibilités de la personnalisation. L’imprimé devient une expérience », explique Chris Jones, Print Production Manager chez Novalia, dont l’innovation technologique est à la base de la démarche de la marque américaine.
Créée en 2006 après six ans de recherche et développement, la société britannique Novalia (Cambridge) met à la disposition de ses clients (agences de communication et grandes marques) une innovation : une encre conductrice. Et l’imprimé devient tactile. De quoi « scratcher » sur des boîtes à pizza…
Une relation immédiate avec le consommateur
Au-delà de ces campagnes événementielles, le numérique, en s’associant au packaging avec toute sa flexibilité, ouvre la voie du marketing instantané. La marque brésilienne de café Pelé l’a bien compris, en s’appuyant sur la personnalisation de packaging dans ce qu’elle a de plus immédiat. La marque a eu la formidable idée d’utiliser l’édition du jour du célèbre quotidien O Estado de São Paulo comme élément de packaging, afin d’insister sur la fraîcheur du café. Une personnalisation permise par le potentiel de l’impression numérique. En effet, en numérique, imprimer 100 exemplaires identiques ou 100 exemplaires différents coûte le même prix et prend autant de temps. Mais si les conditions de production sont les mêmes, l’impact, quant à lui, est tout autre. Les consommateurs ont ainsi pu s’assurer, pendant plusieurs semaines, de la fraîcheur du café grâce à ce packaging personnalisé. Un packaging qui suit pas à pas la stratégie marketing de la marque et s’adapte presque en temps réel aux attentes du consommateur : c’est le time-to-market.
La marque brésilienne de café Pelé s’est offert une belle opération de communication, imaginée par l’agence de publicité Lew’Lara\TBWA, en s’appuyant sur la personnalisation de packaging. L’idée : utiliser la Une du célèbre quotidien O Estado de São Paulo sur les emballages. « La couverture d’un journal a toujours été utilisée comme l’une des principales références au temps. Partant de cette idée, nous avons voulu montrer avec créativité et authenticité que le produit était frais et emballé le jour même (de sa distribution) », explique Felipe Luchi, CCO de Lew’Lara\TBWA.
Une fois l’édition du quotidien bouclée, peu avant minuit, la Une est envoyée chez l’agence Lew’Lara\TBWA, qui s’occupe d’adapter la mise en page au format de l’emballage. Le packaging est ensuite imprimé en numérique au cours de la nuit, parallèlement au journal. Au petit matin, 5000 paquets de café personnalisés se retrouvent dans les rayons des supermarchés de São Paulo, avec quelques exemplaires du journal du jour en tête de gondole afin de prouver qu’il n’y a pas supercherie. Quant aux abonnés du quotidien, ils ont reçu chez eux leur édition matinale, livrée pour l’occasion… avec un paquet de café.
Un packaging qui s’adapte presque en temps réel aux attentes du consommateur : c’est le time-to-market
La micro-segmentation pour tous
De nouvelles stratégies marketing voient le jour mais également de nouvelles marques. Auparavant coûteux et complexe, le lancement d’un nouveau packaging est aujourd’hui accessible. Nul besoin de se lancer dans des milliers d’exemplaires. De petites marques peuvent ainsi marketer leurs produits avec des emballages qualitatifs, en se délivrant des contraintes de production. Elles peuvent, au même titre que les grandes marques, faire des tests et évoluer.
A l’image de Michel & Augustin, de nouvelles marques, parfois avec des produits locaux, ont émergé ces dernières années dans les circuits de grande consommation. Mais se déployer dans les réseaux de la grande distribution et se faire remarquer nécessite de proposer dès le départ une gamme complète. Une exigence accessible aux grandes marques qui peuvent prendre le risque de lancer de multiples références, de les tester et d’enlever celles qui ne fonctionnent pas suffisamment. Et si une telle opération pouvait, il y a peu, paraître risquée, voire inaccessible pour les jeunes pousses, le contexte a changé. Une nouvelle marque peut aujourd’hui se lancer avec une dizaine de références, en minimisant les risques d’invendus et en créant de l’impact avec un packaging au plus près de son identité.
C’est le cas de la marque Yooji, spécialiste des aliments surgelés biologiques pour bébé. Ici, le packaging est entièrement produit en numérique. Une nécessité pour cette jeune marque, qui dispose déjà d’un grand nombre de références qu’il aurait été impossible de traiter autrement qu’en numérique. La marque, qui travaille des produits bio, souhaitait pour ses packaging des couleurs systématiquement adaptées au contenu (légumes verts, féculents…). Les codes couleurs et la promotion des légumes frais utilisés, tous différents selon les recettes, appuient sa communication fondée sur la qualité nutritionnelle des produits. Un argument essentiel pour une marque d’aliments pour bébé. Cette combinaison de couleurs et de visuels donne un nombre impressionnant de packaging différents pour une jeune marque. Les petites séries permises par l’impression numérique offrent à Yooji la possibilité d’être distribuée en grande surface, mais aussi de répondre à l’attente des consommateurs d’être tous traités de façon différente. Même si l’entreprise est la même, le consommateur a le sentiment d’avoir acheter un produit différent et qui lui correspond (local, naturel…). Petite série ou mono-exemplaire, qui dit packaging unique dit contenu unique. La marque peut dire ce qu’elle veut à chacun de ses clients.
Grâce à la micro-segmentation, le packaging devient le premier ambassadeur d’une marque
Du packaging personnalisé au packaging connecté
Créée il y a tout juste 11 mois par Digital Packaging, en collaboration avec l’école de design Strate, la start-up My Pack Connect est « un centre de jus de cervelle », selon les mots d’ Antoine Tesquier Tedeschi, brand manager. My Pack Connect est un outil de reconnaissance du packaging sans technologie embarquée, une sorte de « Shazam » de l’image. L’application reconnaît le visuel et les couleurs de chaque packaging et de chaque référence. Une traçabilité qui a permis à la marque française de whisky haut de gamme Naguelann, dont les produits sont souvent offerts comme cadeau premium, de connecter sa dernière cuvée. Le packaging n’avait donc plus qu’à devenir un moyen de communication entre l’acheteur et le destinataire du cadeau. Photos souvenirs, messages vidéos : toutes différenciées, les bouteilles peuvent ainsi délivrer des contenus uniques.
Adapter les informations réglementaires au marché de distribution, déployer une campagne événementielle mondiale, atteindre un groupe d’influenceurs à travers un message dédié et unique, créer une expérience utilisateur engageante, lancer une nouvelle gamme ou faire sa place dans les grands réseaux de distribution : chacun s’approprie la personnalisation en fonction de ses besoins. Grâce à la micro-segmentation, le packaging devient le premier ambassadeur d’une marque, en faisant entrer le marketing dans la vie quotidienne du consommateur.