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    Lorge, label innovation

    Moins médiatisés que les grands groupes, de nombreux imprimeurs du secteur de l’étiquette adhésive opèrent en toute indépendance, creusant leur sillon avec conviction et singularité. C’est le cas de Lorge, qui, au fil d’une histoire plus que centenaire, aura su évoluer de l’impression de labeur vers le numérique, pour aujourd’hui s’inscrire à la pointe de l’innovation et servir des micro-brasseries locales comme des multinationales pharmaceutiques.

    De Guignol à Bayer, la vie des entreprises est parfois faite de grands écarts. C’est le cas de l’imprimerie Lorge, qui, en 1916, éditait le journal satirique Guignol. Fondé par le typographe Victor Lorge, l’hebdomadaire lyonnais, devenu une référence humoristique de la capitale des Gaules, tirait à 80 000 exemplaires en 1945. Les années passant, le  titre a peu à peu perdu son lectorat, obligeant la famille Lorge à se concentrer sur son activité d’impression de labeur, avant que ne se pose la question d’une transition vers l’étiquette adhésive, à la fin des années 90.

    PIONNIER DU NUMÉRIQUE

    La demande et l’impulsion initiale viendra du laboratoire pharmaceutique Aguettant, client historique de l’imprimerie qui incite Lorge à se lancer sur ce marché. « Ils se sont équipés d’une machine de pose d’étiquettes adhésives et, en qualité de fournisseur, nous avons suivi le mouvement, rembobine Didier Loffreda, l’actuel dirigeant de l’imprimerie. L’impression de labeur était en perte de vitesse, il s’agissait pour nous d’une opportunité intéressante. »

    Didier Loffreda, entré chez Lorge en tant que commercial pour développer le périmètre de l’étiquette adhésive, a gravi les échelons un à un. Il est aujourd’hui seul à la tête de l’entreprise. Sous son impulsion, l’entreprise a largement étoffé son parc numérique. Lorge fut ainsi l’un des premiers imprimeurs français à investir dans une solution HP Indigo, en 2003. À l’époque, l’entreprise réalisait un chiffre d’affaires annuel d’1,3 million d’euros et acquérir cette imprimante représentait un investissement considérable. « Il s’agissait d’une grande prise de risque, mais nous avons agi en pionniers. Cela nous offre aujourd’hui une totale maîtrise de la technologique numérique », se félicite Didier Loffreda.

    Lorge, qui a généré 9,1 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2022, possède à présent quatre imprimantes numériques au sein de son atelier de 2 000 m2 : deux modèles HP Indigo et deux solutions jet d’encre Domino. Un profil rare, pour ne pas dire introuvable ailleurs sur le territoire français, pour une imprimerie indépendante officiant dans l’étiquette adhésive.

    LE « LAB », CENTRE NÉVRALGIQUE

    Cet équipement pléthorique n’est pas le seul élément qui distingue Lorge de ses pairs. La société, qui occupe un bâtiment discret à Vénissieux (69), a créé une cellule de recherche et développement baptisée le « LAB » – un acronyme pour « Lean », « Action » et « Business ». Fédérant une équipe pluridisciplinaire pour analyser, générer et prototyper des idées, ce service conçoit des solutions sur-mesure pour les clients de l’entreprise. Le LAB, système normé ISO, constitue la raison d’être de l’imprimeur aux 70 collaborateurs. « Si un prospect nous contacte en sachant exactement ce qu’il veut, en ne cherchant qu’une solution prix, nous ne sommes pas le bon interlocuteur, reconnaît Didier Loffreda. En revanche, nous travaillons sur des problématiques plus globales, demandant une réflexion profonde sur plusieurs aspects, du choix des matières à celui des technologies, en passant par le volet financier. »

    L’éco-conception des étiquettes est l’un des sujets majeurs adressés par le LAB. Le premier projet relatif à cette problématique concernait une visserie basée en Haute-Loire, qui lançait le conditionnement de ses produits en ESAT (Établissement et Service d’Aide par le Travail). Un changement impliquant la réduction de la taille des rouleaux adhésifs, pour s’adapter à la chaîne présente sur le nouveau site de production. « La taille et la forme des étiquettes ont été revues, ainsi que leur mode d’impression. Nous avons réussi à diviser le conditionnement par quatre et multiplier le nombre de références par vingt, tout en conservant le même prix au mille. Aujourd’hui, l’ensemble de la production de la visserie est basée sur ce système d’éco-conception et ils fournissent une grande chaîne de magasins de bricolage », explique Didier Loffreda.

    1ER IMPRIMEUR LABELLISÉ « FRANCE CONSIGNE »

    Le projet majeur du moment orchestré par le LAB touche aux étiquettes lavables. L’imprimeur est impliqué sur le sujet depuis cinq ans, suite à une rencontre avec les dirigeants de Rebooteille, une société coopérative d’intérêt collectif visant à redynamiser la filière de réemploi des emballages en verre dans les départements du Rhône, de la Loire et de l’Ain. A l’époque, Lorge ne connaissait rien à l’étiquette lavable, mais le challenge était tentant. « Nous avons étudié la faisabilité technique avec HP Indigo et le laveur drômois Ma Bouteille s’appelle Reviens. Les essais validés, nous avons démarché des micro-brasseries, en leur proposant d’optimiser le format de leurs étiquettes et de mutualiser leurs productions, pour réduire les coûts », présente Didier Loffreda. Les marques locales La Canute Lyonnaise, Nomade, Caribrew ou encore La Furieuse ont rapidement répondu à l’appel : 50 000 étiquettes lavables ont été produites la première année et Lorge est devenu le premier imprimeur français labellisé par France Consigne. 

    L’expérience du secteur pharmaceutique de Lorge, acquise auprès de Bayer et ses commandes mensuelles de 50 millions d’étiquettes, a aidé l’entreprise à répondre aux contraintes du lavable. « Respecter un cahier des charges ultra strict, on sait faire depuis de nombreuses années. D’ailleurs, les premières étiquettes lavables que nous avons réalisées étaient conçues sous le contrôle de nos opérateurs agréés pour le secteur pharmaceutique », explique le dirigeant. A présent, Lorge maîtrise le process et imprime des étiquettes lavables toutes les semaines, à destination des brasseries, des viticulteurs, et de plus en plus pour le secteur agroalimentaire. « On collabore avec Citeo pour labelliser un pot en verre en vue d’un lancement à l’échelle industrielle. Et la filière du vrac s’y met également, donc nous leur apportons notre expertise », révèle Didier Loffreda.

    L’ENJEU DU RÉEMPLOI

    Dans les mois qui viennent, Lorge continuera de s’investir toujours plus dans l’impression d’étiquettes lavables. Le process est désormais maîtrisé en interne et le champ d’applications devrait s’élargir. « Le réemploi des emballages et des étiquettes est un enjeu clé pour la préservation de la planète, martèle le dirigeant. La filière du verre évolue à un stade avancé, mais le plastique pourrait suivre rapidement. Nous avons enregistré des premières demandes ».

    Autre piste parmi tant d’autres, l’imprimeur collabore avec la start-up française Lactips pour imprimer une étiquette à base de protéines de lait. Un matériau qui a l’avantage d’être hydrosoluble, biosourcé et biodégradable. Lorge a lancé une première production de 300 étiquettes avec succès, mais des tests sont encore en cours pour industrialiser l’impression à plus grande échelle et faire baisse les coûts.

    Pour assurer son développement, Lorge mise donc sur la recherche, mais aussi sur son statut d’imprimeur indépendant. « Nous sommes une PME expérimentée, libre de ses choix et possédant une maîtrise des outils de production industrielle. Cela répond particulièrement bien aux besoins spécifiques de notre clientèle historique, le secteur pharmaceutique, qui attend rigueur, réactivité et créativité », conclut Didier Loffreda.

    Source des visuels : Lorge.

    Détenteur d’un MBA en Management stratégique (Université Laval, Canada) et d’une Maîtrise de gestion (Paris IX Dauphine), Bertrand Genevi possède dix ans d’expérience dans les médias (L’Express, 20 Minutes) et en agence de communication (Hopscotch).