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    L’impression numérique redessine la mode

    La sublimation par Richard Quinn

    Si l’impression numérique ne représente encore que 3 % du marché de l’impression textile, 80 % des marques de luxe y ont déjà recours.

     

    Un secret de polichinelle entretenu par les grandes maisons, peu enclines à dévoiler leurs secrets de fabrication. Tout le contraire d’une nouvelle génération de créateurs et designers textile, qui exploite toutes les possibilités offertes par l’impression numérique – personnalisation, petites séries, vêtement à la demande – pour se faire une place dans les secteurs de la haute couture et du prêt-à-porter.

    Il y a un peu moins d’un an, Chanel annonçait des prises de participation dans quatre PME de la Loire spécialisées dans la soie. La marque de luxe expliquait alors que ces investissements visaient à « maîtriser l’ensemble de la chaîne de fabrication des tissus, tout en préservant sur le territoire national des savoir-faire rares et exclusifs ». Parmi ces quatre entreprises, Hugotag Ennoblissement (42), spécialiste de la teinture sur soie. Un « savoir-faire rare et exclusif » qui côtoie, depuis 2010, une activité d’impression numérique textile, grâce à un investissement sur deux machines QualiJet. « Nous imprimons en très haute définition, 720 dpi par 720 dpi, soit 800 pixels/mm2, avec 8 encres différentes et en 8 passages, et non pas 4 traditionnellement, ce qui offre une grande précision dans les détails et les sertis », précise le Pdg, Philippe Magat. Une nouvelle compétence qui a séduit ses clients historiques, fabricants de soieries, mais qui a également permis à l’entreprise d’attirer de nouveaux clients du secteur de la mode (stylistes, créateurs, designers textile). « Nous accompagnons des jeunes stylistes qui démarrent, parfois avec seulement dix foulards, mais plusieurs motifs différents. Aujourd’hui, il n’y a plus de limite en termes de créativité », poursuit Philippe Magat.

     

    Ensemble en film Mylar du couturier anglais Richard Quinn imprimé en sublimation sur une machine de la gamme Epson SureColor SC-F.
    Robe et accessoires du couturier anglais Richard Quinn, imprimés en sublimation sur une machine de la gamme Epson SureColor SC-F.

    Petites séries et réactivité

    « Il s’agit d’un savoir-faire peu valorisé, car l’impression numérique est encore associée aux cartes de visite. Pourtant, certains accessoires de mode sont imprimés avec une telle qualité qu’il est très difficile de savoir qu’il s’agit de numérique », explique Marie-Pierre Dumaine, Pdg de Grain de Couleur (69), spécialiste de l’impression numérique textile pour les secteurs de la décoration et de l’habillement. Un segment de l’habillement dominé par les imprimeurs italiens de la région de Côme, véritable Silicon Valley de l’impression numérique textile. « De grandes marques italiennes impriment beaucoup de pièces en numérique, car cette technologie permet de produire rapidement, à des prix intéressants sur certains supports, et de gérer les petites séries », poursuit la dirigeante, dont l’entreprise travaille également avec des couturiers et des entreprises françaises du luxe, pourtant pas épargnées par le tropisme italien.

     

    Il faut dire que le savoir-faire transalpin attire même les fabricants de machines d’impression. Ainsi, en 2016, Epson a racheté son homologue Robustelli, dont la machine d’impression numérique jet d’encre Monna Lisa, équipée de têtes d’impression Epson, fait figure de référence sur le marché. Le constructeur japonais s’est rapidement imposé sur le marché de l’impression numérique textile, notamment grâce à sa gamme de machines de sublimation SureColor, mais aussi en nouant des partenariats avec des jeunes créateurs de mode, comme l’Anglais Richard Quinn (voir interview). « Nous ne voulons pas seulement fabriquer des machines, mais créer un réseau entre designers textile, prestataires d’impression et marques », explique Elisabeth Vilar-Bothin, responsable du marché Arts Graphiques chez Epson France.

     

    Une porte d’accès au marché

    Une démarche qui semble fonctionner. Chez Grain de Couleur, on accompagne des créateurs qui n’auraient pas eu accès au marché sans l’impression numérique. C’est le cas d’Anne Boivin, créatrice de la marque Onikann, qui imprime ses foulards et accessoires de mode en numérique depuis plus de dix ans. « C’est une technique qui me permet d’exprimer ma créativité. Avec le numérique, on n’est plus obligé de séparer les couleurs et de travailler en aplats. Cela me permet également d’accéder à de petites séries, de 100 à 150 pièces, alors qu’avant il fallait des milliers de mètres pour amortir les cadres et cylindres, explique la créatrice. J’édite deux collections par an, mais si j’ai besoin d’adapter une gamme, pour un pays en particulier, ou de refaire une coloration, je peux le faire en quelques semaines ». Si ses carrés de mousseline de soie et lavallières sont distribués au Bon Marché pour la 4e année consécutive, Anne Boivin fournit également des imprimés à des marques : Nespresso, L’Oréal, la Comédie Française, le maroquinier de luxe Camille Fournet ou encore Printemps lui ont ainsi commandé des broches textile, des foulards et même des tee-shirts.

    Tissus imprimés
    Foulards en soie de la marque Onikann, imprimés par la société Grain de Couleur (69).

    « L’impression numérique me permet d’accéder à des petites séries, de 100 à 150 pièces, alors qu’avant il fallait des milliers de mètres pour amortir les cadres et cylindres », explique Anne Boivin, la créatrice d’Onikann.

    La marque Tô & Guy fabrique des vêtements personnalisés et sur-mesure à partir d’un avatar 3D
    Tô & Guy fabrique des vêtements personnalisés sur-mesure à partir d’un avatar 3D de la cliente créé à partir d’une photo prise via l’application Nettelo.

    Vêtement à la demande

     

    Certains vont même encore plus loin et parient sur l’hyperpersonnalisation du vêtement. Comme la marque Tô & Guy, qui mise sur la modélisation 3D et l’impression numérique pour développer le sur-mesure dans le prêt-à-porter haut de gamme féminin. Concrètement, Tô & Guy s’appuie sur l’application pour smartphones Nettelo qui crée un avatar 3D de la cliente à partir d’une photo. Le vêtement est ensuite dessiné au plus juste des proportions de la cliente. « Grâce à la 3D, on ne fait fabriquer que sur commande. Ainsi, on peut prendre des risques créatifs tout en réduisant les risques de retours, explique Guy Bernier, co-fondateur de la marque avec la styliste Tô Thang. Les collections été/hiver que l’on décide deux ans à l’avance, ça n’a plus de sens ». Aujourd’hui, l’entreprise imprime ses soies en numérique sur une machine Monna Lisa de la plateforme technologique associative E-Mode (Cholet), à défaut de le faire chez un imprimeur. Car dans l’impression numérique, aussi petites soient les séries, le modèle unique n’a pas encore trouvé de modèle économique.

     

    Pourtant, certains imprimeurs, comme Marie-Pierre Dumaine, y croient et voient même un potentiel nouveau business.

     

    « Je crois beaucoup à cette idée : grâce aux performances et aux évolutions de l’impression numérique, Grain de Couleur pourra demain créer ses propres produits, et dans le même temps sera à disposition de tous ceux qui auront une idée de création, qu’ils soient professionnels ou particuliers ». La mode de demain.

    Chiffres clés

     

    1,95 milliard : Nombre de m2 de tissus qui seront imprimés en numérique en 2021 (870 millions en 2016).

    15,7 % : Taux de croissance annuel de l’impression numérique textile prévu sur les cinq prochaines années

    2,42 milliards d’euros : Chiffre d’affaires que génèrera l’impression numérique textile en 2021 (1,17 milliard en 2016)

    (Source : The Future of Digital Textile Printing to 2021, Smithers Pira)

    Deux questions à Richard Quinn

    Richard Quinn - Fashion Designer
    Le jeune créateur anglais (26 ans), lauréat du concours international H&M Design Award 2017 et partenaire d’Epson, nous explique pourquoi l’impression numérique facilite et enrichit son travail.

     

    IC LE MAG : Quels sont les avantages de l’impression numérique pour un créateur de haute couture comme vous ?

    RICHARD QUINN : L’impression numérique me donne une grande liberté créative et me permet d’appliquer mes styles à des produits complets. J’aime utiliser des effets de collage floraux et vintage et, grâce au processus d’impression à sublimation de la SureColor SC-F de Epson, il est très facile de créer des produits et d’imprimer sur les coutures, même à l’intérieur de pièces comme des gants. Je peux réaliser des effets saisissants et je sais que je peux facilement associer des couleurs entre des matières et produits différents. L’impression numérique est un outil formidable, car elle me donne la possibilité d’être réactif face aux demandes du marché et de créer des produits sur-mesure avec rapidité.

     

    IC LE MAG : Comment cela se traduit-il dans votre travail quotidien ?

    RICHARD QUINN : Je crée mes modèles à la main avant de les numériser et éventuellement de les manipuler, puis je les imprime au moyen de techniques numériques et/ou de sérigraphie. J’aime mélanger les procédés pour créer de nouveaux effets. Nous nous servons de la sérigraphie sur de nombreux textiles naturels, alors que les mélanges de polyester sont plus adaptés à la sublimation. De nombreux textiles à sublimation égalent aujourd’hui la soie, le coton, le velours ou le satin.

    Ensuite, pour les pièces uniques ou des petites et moyennes séries, j’imprime dans mon atelier, en sérigraphie ou en numérique. En revanche, pour les collections en très grandes séries que je développe pour des revendeurs, la tâche est confiée à des imprimeurs du monde entier.

     TECHNIQUE : IMPRESSION TEXTILE

    En impression numérique textile, quatre types d’encres peuvent être utilisées, en fonction des supports à imprimer. Les encres réactives : pour l’impression des tissus en fibres naturelles (coton, lin, soie, chanvre, jute, etc.). Bonne résistance à la lumière et bonne tenue au lavage. Les encres acides : pour l’impression des tissus nylon, soie, laine et cuir. Souvent utilisées pour les vêtement de sport, les maillots de bain, la lingerie, les drapeaux, les cravates et les foulards. Couleurs brillantes. Bonne résistance à la lumière et bonne tenue au lavage. Les encres dispersives (ou sublimables) : pour l’impression des tissus polyester. Moins brillantes que les encres acides et réactives. Grande résistance au lavage. Les encres pigmentaires : pour une large gamme de tissu coton et mélange coton. Plus les encres contiennent de pigments, plus les couleurs sont vives, mais moins bonne la tenue au lavage. Bonne résistance à la lumière.

    En impression numérique textile, quatre types d’encres peuvent être utilisées, en fonction des supports à imprimer. Les encres réactives : pour l’impression des tissus en fibres naturelles (coton, lin, soie, chanvre, jute, etc.). Bonne résistance à la lumière et bonne tenue au lavage. Les encres acides : pour l’impression des tissus nylon, soie, laine et cuir. Souvent utilisées pour les vêtement de sport, les maillots de bain, la lingerie, les drapeaux, les cravates et les foulards. Couleurs brillantes. Bonne résistance à la lumière et bonne tenue au lavage. Les encres dispersives (ou sublimables) : pour l’impression des tissus polyester. Moins brillantes que les encres acides et réactives. Grande résistance au lavage. Les encres pigmentaires : pour une large gamme de tissu coton et mélange coton. Plus les encres contiennent de pigments, plus les couleurs sont vives, mais moins bonne la tenue au lavage. Bonne résistance à la lumière.

    Résumé
    L’impression numérique redessine la mode
    Titre
    L’impression numérique redessine la mode
    Description
    Si l’impression numérique ne représente encore que 3 % du marché de l’impression textile, 80 % des marques de luxe y ont déjà recours.
    Auteur

    Journaliste spécialisé dans le domaine des industries graphiques, Florent Zucca est rédacteur en chef du magazine IC LE MAG / Industries Créatives, où il analyse les opérations de personnalisation menées par les marques en matière de retail, de packaging, de décoration et de communication. Diplômé de l’ISCPA Lyon (Institut Supérieur de la Communication, de la Presse et de l’Audiovisuel), il a auparavant travaillé, pendant près de dix ans, dans la presse économique.